
Ce jeudi 28 Juillet 2011, Marcel Duchamp aurait eu 124 ans !…
Père d’une œuvre immortelle Duchamp revient aujourd’hui sur le web et le marché de l’art virtuel. Au siècle dernier (le 20ième) il y a eu deux autoroutes artistiques, s’accordent à dire artistes et historiens, deux tornades qui écrasèrent les velléités de beaucoup de créateurs ; elles ont pour noms : Matisse/Picasso et Man Ray/Duchamp. Dans la course conjoncturelle de la création contemporaine et d’un marché de l’art mondialisé, une chose est certaine : ce sont les pas du créateur du « ready made » et de l’art conceptuel, Marcel Duchamp, qui mènent le monde de l’art d’aujourd’hui. Et lorsque l’on observe les jeunes artistes qui scrutent les mutations de leurs temps et les technologies nouvelles qui les engagent, on constate que le conceptuel reste le maître étalon. Qu’ils travaillent sur les réalités virtuelles, l’interactivité, le web ou l’immersion physique des spectateurs dans leurs univers, ou sur le dernier espace public abordés par beaucoup d’artistes : celui des réseaux sociaux, les créateurs de ce début de 21ième siècle se retrouvent tous face au problème du marché. Comment vendre du virtuel ? Comment contraindre à son art le hard et le soft dans le temps du collectionneur ? En deux mots, comment assurer la maintenance de ces œuvres complexes car vivantes (en constante transformation) ?
Dans ce paysage, Thomas Cheneseau (jeune artiste français) n’est peut-être pas un pionnier, mais fait figure d’éclaireur. Depuis plus de 3 ans, il sillonne les réseaux sociaux avec une certaine sagacité, car outre son travail avec l’artiste Systaime, ou sa présence à la Fiac 2010 (lafiac.com), il est aujourd’hui montré à Venise (Pavillon Internet de la fameuse Biennale). Ce jeune poitevin, manipule les réseaux sociaux à des fins artistiques et vient de mettre en vente le profil Facebook de Marcel Duchamp, son Maître. Car qui mieux que Duchamp interrogea la virtualité d’un art réduit à la plus simple expression : LE CONCEPT
Cet ancien des arts déco a vendu comme œuvre d’art ce « profile » Marcel Duchamp. Et je l’ai acheté. C’était lors de futur en scène. Et tout c’est fait par SMS. Lui à Poitiers et moi au 104, à la conférence Digitalarti/DrouotMontaigne sur la marché de l’art numérique au moment où sur scène chacun enfonçait des portes ouvertes sans déterminer pourquoi l’art numérique rendait les collectionneurs si timorés. Cheneseau à créé un profil Marcel Duchamp sur Facebook afin de se connecter à toutes les pages relatant Duchamp et son (déjà) avatar Rrose Sélavy. Ce profil devient alors une « décharge » de « l’identité numérique de Duchamp » et pour Thomas Cheneseau : la preuve vivante de l’existence de Duchamp chez ses contemporains. L’accès en étant fermé grâce aux paramètres de confidentialité de Facebook l’artiste en a réservé l’accès et seul le contenu est accessible au collectionneur. Seul et unique propriétaire qui a seul l’honneur de cette « décharge ». Alors à la question est : qu’est-ce que j’ai acheté à travers ce contrat d’achat de cette oeuvre à la fois si virtuelle et si réelle ? Les codes de connections sur Facebook peut-être… et peut-être une complicité avec Marcel ! Pourtant ce qui m’a intéressé dans ce geste, c’est d’acquérir un ready made du troisième type (celui de l’au-delà !!!) et plus certainement l’idée de rendre hommage au fameux « urinoir » de Duchamp. Car, si je participe à quelques réseaux sociaux, si j’ai été le commissaires de grandes rétrospectives d’artistes qui travaillent avec les technologies nouvelles et futuristes, je ne suis jamais allé surFacebook… Mon nom me le permettrait-il ? Et à travers tous les fantasmes colportés sur les perversions de Facebook, celui nauséabond « d’urinoir du web » est certainement le plus prégnant. il était donc juste que cette page Facebook devienne cet urinoir du web, cette œuvre si simple et si belle. Reste à démontrer que cet objet du quotidien est une oeuvre d’art.
Jean Jacques Gay